Déracinement, souvenirs...

Le goût de Joël Fosse pour le répertoire traditionnel américain l'a amené un jour à se pencher sur un fait majeur de l'histoire des États-Unis, dont nous n'avons en Europe qu'une lointaine idée : le Dust Bowl, succession de tempêtes de poussière qui ont détruit principalement les terres de l'Oklahoma, du Kansas et du Texas déjà frappées de sécheresse et épuisées par des pratiques agricoles délirantes. Cela s'est passé à l'époque de la Grande Dépression, dans les années 1930. Il n'y a donc pas si longtemps...

Si ce désastre environnemental d'avant-guerre, qui a jeté sur les routes des milliers de fermiers désespérés et tué maints enfants en raison de l'inévitable absorption de particules fines, n'a finalement dévasté que le centre des États-Unis, imaginons ce à quoi pourraient nous exposer le bulldozer de l'économie mondialisée et notre aveuglement consumériste à l'heure du dérèglement climatique...

En 1940, le chansonnier Woody Guthrie, témoin direct de cette tragédie écologique et humaine, a enregistré l'album Dust Bowl ballads.Ce témoignage sonore, ainsi que Les raisins de la colère de John Steinbeck, ont inspiré à Joël Fosse le thème de Déracinement, souvenirs...

Cependant, le Dust Bowl évoque de manière indirecte d'autres champs de préoccupation : le drame des réfugiés, notre survie sur la planète Terre... mais aussi le souvenir (lorsqu'il n'est pas synonyme de complaisance) et les territoires préservés, terreaux à partir desquels nous pouvons imaginer reconstruire un monde habitable.